"La fille à la casquette" avec P. Newman et J. Woodward
...Une automobile grise stationnait à l'écart dans un halo. Il s'y engouffra sans hésiter par la porte du passager.
Elle l'attendait, sagement assise derrière le volant. Leurs bouches se rejoignirent à l'intersection des deux sièges selon un rituel établi depuis qu'ils se retrouvaient dans la clandestinité. Mais, en deux ans, ils avaient appris à le bousculer à tour de rôle, afin que l'habitude n'entamât la passion.
Ils échangèrent un long baiser, si imaginatif qu'il pouvait à lui seul dresser l'inventaire de tout ce qui peut advenir de poétique et de prosaïque entre deux êtres soumis à leur seul instinct, de l'effleurement à la morsure, de la tendresse à la sauvagerie. Toutes les figures de l'amour s'inscrivaient dans cette étreinte : elle avait la mémoire de celles qui l'avaient précédée. Ils s'étaient mangés, bus et lapés. Quand leurs bouches se déprirent enfin, ils n'étaient plus qu'un seul et même souffle.
Anticipant sur son premier mot, elle posa son doigt à la verticale sur ses lèvres et, dans un sourire de connivence, l'entraîna hors de la voiture....


P. Assouline : Double vie pg 14-15

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