J'aurai gouté vos yeux, votre front, votre main,
Plus que je n'ai goûté l'eau limpide et le pain,
Votre bouche m'aura pour toujours abreuvée,
Votre âme, je l'aurai tout entière rêvée,
Je vous ai possédé comme on étreint la mort,
Je vous ai convoité comme on convoite l'or,
Je vous ai parcouru comme une route neuve,
Vous avez ondoyé dans mes bras comme un fleuve...

Toutes mes nuits n'étaient faites que de votre ombre,
Et vous m'avez semblé sans limite et sans nombre,
Et vous m'avez paru grand de tout l'univers.
En moi vous affluiez avec le bruit des mers,
Avec les cris humains et le souffle du rêve.
Vous étiez doux en moi de même qu'une grève,
Sonore comme un bois quand les vents sont épars,
Vous avez à jamais habité mes regards...

Chantal N.
Chantal N.

J'aurai bu votre vie à sa source d'eau vive ;
Vous fûtes éternel dans l'heure fugitive.
Je vous dois l'infini, le songe, la douleur,
Et vous avez changé le rythme de mon coeur...

Je vous ai fait ma couche et ma table servie
En tous lieux, je vous ai, dans mon ombre, emporté.
Vous fûtes ma maison et je vous ai planté
A jamais, comme un arbre, au milieu de ma vie...


H. Picard


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