Quand de ta lèvre à demy-close
(Come entre deux fleuris sentiers)
je sens ton haleine de rose,
Mes lèvres, les avant-portiers
Du baiser, se rougissent d'aize,
Et de mes souhaitz tous entiers,
Me font jouïr quand je te baize.
Car l'humeur du baiser apaise,
S'escoulant au coeur peu à peu
Cette chaude amoureuse braize,
Dont les yeux allumoient le feu.
Ronsard
 
Amour, tu es trop fort, trop foible est ma Raison
Pour soustenir le camp d'un si rude adversaire
Va, badine Raison, tu te laisses desfaire :
Dez le premier assault ont te meine en prison
............
La Raison contre Amour ne peut chose qui vaille :
Il faut contre un grand Prince opposer un grand Roy.
Ronsard
 
 
Quoy ? me donner congé d'embrasser chaque femme, Mon feu des-attizer au premier corps venu, Ainsi qu'un vagabond, sans estre retenu, Abandonner la bride au vouloir de ma flame : Non, ce n'est pas aimer. L'archer ne vous entame Qu'un peu le haut du coeur d'un traict foible et menu. Si d'un coup bien profond il vous estoit connu, Ce ne seroit que souffre & braise de vostre ame. En soupçon de vostre ombre en tous lieux vous seriez : A toute heure, en tous temps, jalouse me suivriez, D'ardeur & de fureur & de crainte allumée. Amour au petit pas, non au gallop vous court, Et vostre amitié n'est qu'une flamme de Court, Où peu de feu se trouve, & beaucoup de fumée.
Ronsard
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