Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques
Jouant du luth et dansant et quasi
Tristes sous leurs déguisements fantasques.
Tout en chantant sur le mode mineur
L'amour vainqueur et la vie opportune,
Ils n'ont pas l'air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune.
La pluie a comme un vague secret de tendresse
Plein de résignation, de somnolence aimable.
Discrète, une musique avec elle s'éveille
Qui fait vibrer l'âme lente du paysage.
C'est un baiser d'azur que la terre reçoit.
Le mythe primitif à neuf réalisé,
Le contact d'une terre et d'un ciel déjà froids
Dans la douceur d'un soir qui n'en finit jamais.
...
Mon âme vers ton front où rêve, ô calme soeur,
Un automne jonché de taches de rousseur,
Et vers le ciel errant de ton oeil angélique
Monte, comme dans un jardin mélancolique,
Fidèle, un blanc jet d'eau soupire vers
l'Azur !
-Vers l'Azur attendri d'Octobre pâle et pur
Qui mire aux grands bassins sa langueur
infinie
et laisse, sur l'eau morte où la fauve agonie
Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles...
-On entend dans les bois lointains des hallalis.
...
Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux;
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule,
Sur son grand front rêveur s'inclinent les roseaux.